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Série noire pour les métropoles

par Sébastien Fournier
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Les métropoles sont la forme la plus aboutie de l’intercommunalité. Pourtant elles manquent d’efficacité. C’est le bilan peu flatteur que la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales vient de dresser dans un rapport d’information. Un constat malvenu à l’approche de l’examen du projet de loi sur la décentralisation.

Par Sébastien Fournier

Décidément, les métropoles n’ont plus la cote. Fer de lance de l’organisation territoriale, elles essuient actuellement une pluie de critiques, accusées d’égoïsme ou d’arrogance au mépris des petits territoires. Dans le camp de ses détracteurs, le Sénat vient d’en rajouter une couche. Quelques jours avant l’examen du texte de décentralisation, dit 4D (lire notre article), la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales, présidée par la sénatrice UDI Françoise Gatel, vient de rendre un rapport d’information sur leur efficacité “Métropoles : pour de nouvelles dynamiques territoriales”. Les sénatrices Dominique Estrosi-Sassone (LR, Alpes-Maritimes), Michelle Gréaume (PCF, Nord) et Sylvie Robert (PS, Ille-et-Vilaine), accompagnées par la présidente de la délégation, ont sondé les 19 métropoles de droit commun (les métropoles à statut particulier ont été écartées) et leurs 675 communes membres. Objectif : vérifier d’une part qu’elles sont performantes dans l’exercice des compétences, et d’autre part qu’elles conduisent à un développement solidaire des territoires environnants.

Les métropoles priées de rester à leur place

Les rapporteurs notent que la répartition des compétences entre les métropoles et les communes n’est pas toujours évidente et peut provoquer des frustrations. En clair, les métropoles auraient une fâcheuse tendance à s’arroger les prérogatives des communes sans en justifier vraiment l’utilité. Le rapport remet sur la table le principe de subsidiarité, qui « implique d’organiser les politiques publiques à l’échelon le plus proche du citoyen, la commune devant être en principe préférée à l’intercommunalité. » Une façon de rappeler que les métropoles doivent rester à leur place. La délégation fait des recommandations pour une répartition plus efficace, à travers notamment une définition plus claire de l’intérêt métropolitain. Mais elle exclut de son champ le développement économique qui a toute sa place au niveau de la métropole.

Un manque de coopérations

Sur le deuxième sujet, l’alliance des territoires, le rapport n’est pas plus flatteur. Les métropoles ne concourent pas vraiment à développer leur hinterland, disent en substance les rapporteurs. Les quatre sénatrices précisent toutefois qu’il existe de bonnes pratiques, comme les 17 contrats de réciprocité (lire notre article). Très habilement, elles vantent l’action de Nantes, dont la présidente de la métropole n’est autre que la patronne de France urbaine, Johanna Rolland. Mais ces démarches sont peu nombreuses, notent-elles. Elles proposent de sortir de « l’image paternaliste d’un ruissellement », qui suppose que les effets positifs de la métropole irriguent son territoire environnant, pour aller vers des coopérations dans une logique « gagnant-gagnant ». Le rapport suggère d’ailleurs que les coopérations soient intégrées parmi les objectifs des CPER. Il propose en outre de récompenser financièrement les métropoles qui s’engageraient dans cette démarche, par une bonification de la DGF.

Un conservatisme bien connu

La critique est sans surprise et s’inscrit dans la droite ligne de la doctrine sénatoriale. Si la délégation reconnaît l’utilité des métropoles, au regard notamment de l’évolution urbaine de notre pays, elle rappelle qu’elles sont seulement un outil au service des communes, ces dernières, étant les seules à détenir le pouvoir. On ne peut pas reprocher au Sénat de rappeler la loi. Et de pointer des dysfonctionnements afin de les réduire. Mais à l’approche de l’examen d’un texte de décentralisation, il conforte l’opinion d’une myriade d’élus opposés à toute progression de l’intercommunalité. Pourtant l’évolution du statut des métropoles serait nécessaire pour donner à leurs exécutifs plus de responsabilités mais surtout davantage de devoirs. Sur ce point, il y a beaucoup à faire.

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