Londres, Paris et Madrid : c’est le trio gagnant des capitales européennes les plus attractives aux yeux des investisseurs immobiliers pour 2024, selon la récente étude « Emerning Trends in Real Estate » publiée par Urban Land Institute (ULI) et PwC. Dans la capitale tricolore, ces mêmes acteurs économiques redoutent la mise en œuvre du PLU bioclimatique.
Par Antoine de Kersaint
Pour mesurer le moral des investisseurs immobiliers face à la crise, il faut feuilleter la (très) fouillée étude européenne « Emerging Trends in Real Estate » 2024. Éditée par Urban Land Institute (ULI) et PwC, cette riche publication fait état de nombreuses inquiétudes, avant tout macroéconomiques. Sur les 1 000 dirigeants européens du secteur interrogés, 88 % d’entre eux invoquent la croissance économique européenne, 86 % le mouvement des taux d’intérêt, et 83 % l’inflation (contre 91 % en 2023). Relevons aussi que 75 % des répondants reconnaissent que les valorisations actuelles « ne reflètent pas avec précision » tous les défis et opportunités de l’industrie immobilière. En revanche, un tiers des personnes interrogées (33 %) se déclarent « optimistes quant à l’augmentation de la rentabilité en 2024 », soit une hausse de 8 points sur un an. « Les avis sont partagés quant aux conditions nécessaires à la reprise du marché », abonde Lisette van Doorn, CEO d’ULI Europe. Selon elle, « la stabilisation des taux d’intérêt, l’atterrissage en douceur de l’économie et la baisse des taux d’intérêt pour rétablir l’équilibre des rendements auront un impact, tout comme les taux de refinancement, entraînant une plus grande inquiétude en raison de l’augmentation des coûts de financement ».
Les villes allemandes en retrait
La publication de ladite étude annuelle, c’est aussi l’occasion de scruter les capitales européennes qui présentent le meilleur potentiel d’investissement et d’opportunités de développement. Et, dans un environnement de marché mouvementé, l’ordre d’arrivée du top 2 n’a pas évolué depuis… trois ans. À savoir : Londres et Paris, qui pèsent 15 % des volumes globaux de transactions sur les neuf premiers mois de 2023. « Pour bon nombre des acteurs immobiliers, cela signifie qu’ils ciblent les villes qui offrent le plus de liquidité dans les périodes plus risquées », pointe Jean-Baptiste Deschryver, associé PwC France et Maghreb. Ainsi, la France est perçue comme un marché important à surveiller en raison de sa liquidité et son attrait croissant offrant une alternative à Londres et au Royaume-Uni. Petite nouveauté dans le classement, Madrid squatte la troisième place – suivie par Milan ou encore Lisbonne. Toujours bien placées, les villes allemandes comme Berlin (4e), Munich (7e), Francfort (9e) et Hambourg (11e) ont baissé dans le classement. La raison : des perspectives économiques moroses outre-Rhin en 2024 qui influencent cette perception pour des villes qui étaient – il n’y a pas si longtemps – considérées comme des refuges sûrs pour les capitaux. Ainsi, les volumes d’investissement en Allemagne ont lourdement chuté de 55 % sur un an (source : MSCI).
Un PLU bioclimatique parisien qui horrifie
Bien que Paris aimante toujours l’appétit des investisseurs immobiliers européens, il est une mesure qui les effraie : l’instauration, par la mairie de Paris, du futur PLU bioclimatique et ses pastilles. De facto, bon nombre de fonds étrangers – qui ont décidé de ne plus investir dans la capitale tant que l’incertitude perdurera sur ce plan local d’urbanisme remanié – s’alarment de se voir obligés de reconvertir des immeubles de bureaux en logements sociaux dans le Quartier central des affaires parisien. « Cette servitude de mixité fonctionnelle aura pour effet d’impacter très fortement les revenus de l’immobilier à usage mixte », prédit Éric Donnet, président d’ULI France et directeur général de Groupama Immobilier. Autrement : lesdits actifs tertiaires pastillés verront leur valeur baisser. « Cette nouvelle législation de planification a la capacité de stimuler l’accessibilité de l’investissement à Paris, mais laisse aussi sceptique quant à son impact sur l’attractivité de l’investissement immobilier professionnel », tentent de résumer les auteurs de l’étude européenne. D’autant plus, que par mimétisme, Lyon, Marseille ou Lille pourraient s’inscrire dans les pas de Paris.
Le flex-office, le coliving et le life sciences en ligne de mire
En parallèle du futur PLU de la capitale, les espaces de bureaux premiums dans les quartiers d’affaires tels que La Défense – répondant aux exigences croissantes en matière d’ESG – attirent « grandement » les investisseurs et promoteurs. Paris, en particulier, semble avoir mieux résisté au phénomène du télétravail, avec des taux d’occupation en moyenne légèrement supérieurs à d’autres villes européennes (notamment Londres), rendant ainsi la demande d’espaces de bureaux haut de gamme – conformes aux normes ESG – plus attrayante pour les investisseurs potentiels. Ces mêmes acteurs du real estate citent l’Hexagone comme une opportunité de marché sur trois classes d’actifs : le flex-office, le coliving et le life sciences. Selon « Emerging Trends in Real Estate », ce sentiment s’explique pour trois raisons : les taux d’occupation élevés des immeubles de bureaux, le manque de logements abordables dans les grandes métropoles et le choix du gouvernement d’investir plusieurs milliards dans l’industrie des sciences de la vie. « Les craintes ne doivent pas nous empêcher d’être créatifs, d’échanger pour trouver ensemble des solutions aux besoins de logements, de bureaux adaptés aux changements des modes de vie et de travail, tout en recherchant de la performance financière, sociale et environnementale », parachève Éric Donnet. Vivement 2024 !
Objectif Métropoles de France, partenaire du SIMIDu 12 au 14 décembre se tient le SIMI, salon de l’immobilier d’entreprise, à Paris. Un rendez-vous annuel qui rassemble la communauté de l’industrie française de l’immobilier pour partager innovations et projets en réponse aux besoins de construction et d’aménagement des villes au service de l’humain. |
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