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Un rapport au vitriol sur l’action de l’écologiste Eric Piolle à Grenoble

par Sébastien Fournier
Temps de lecture : 3 minutes

Que s’est-il passé en six ans de municipalité écologiste grenobloise ? La fondation Jean-Jaurès, proche du parti socialiste, vient de dresser un bilan peu flatteur de l’action d’Eric Piolle, à la tête de la ville depuis 2014, clouant au pilori sa démarche d’un genre nouveau, le municipalisme vert. Une critique sévère qui est avant tout politique.

La fondation Jean-Jaurès vient de publier un rapport sur la politique menée par Eric Piolle, l’actuel maire écologiste de Grenoble, ces six dernières années. Le miracle vert et citoyen s’est-il produit dans la cité iséroise, qualifiée historiquement de « laboratoire » pour ses innovations sociales ? Pas vraiment selon les 6 auteurs* qui ont analysé le bilan de l’équipe municipale à l’aune des promesses du candidat pour une ville citoyenne, respectueuse de l’homme et de l’environnement (on notera, au passage, la participation d’Olivier Noblecourt, le candidat PS qui a échoué à déloger Eric Piolle en 2020). Le résultat est même sévère. D’emblée, les auteurs attaquent vertement la vision de l’édile. La transition écologique à Grenoble se résume aujourd’hui, selon eux, comme « la résultante de changements comportementaux de la société, relevant avant tout de choix personnels érigés en modèles collectifs. » Or, ajoutent-ils, un brin donneurs de leçons, cette transition doit être « la résultante des politiques publiques qui sont le cœur de métier des collectivités locales. » Le ton est donné !

Les populations fragiles sacrifiées

Si les auteurs du rapport font état d’avancées citoyennes comme la tarification solidaire de certains services publics ou l’exercice de la démocratie locale ces six dernières années, ils reprochent à l’élu d’avoir sacrifié les populations les plus fragiles. Par exemple, ils notent qu’aucun projet financé par les budgets participatifs en 2019 n’a concerné le sud de la ville qui concentre la plupart des quartiers populaires. Ils pointent par ailleurs le plan d’austérité décidé en 2015, suite aux coupes budgétaires de l’Etat, qui a laissé « des traces durables dans la ville : baisse massive des subventions aux associations, dans la culture, le sport, le social, fermeture d’un Ehpad et d’une maison de quartier… ». Pire, le rapport précise que le CCAS a vu ses subventions baisser de 25 %.

En matière d’écologie, sujet emblématique, la critique n’est pas plus tendre même si les auteurs soulignent le volontarisme fort sur le développement du vélo. Alors que le taux de déplacements domicile-travail à vélo a augmenté de 30 % dans les quartiers favorisés, ils pointent une stagnation dans les quartiers populaires (3 %). Également, sur la question des transports en commun, ils reprochent à l’élu de ne pas avoir tenu sa promesse de gratuité pour les moins de 25 ans et dénoncent la remise en cause en 2019 de la tarification sociale.

Un refus de l’attractivité

La dernière salve de critiques concerne l’économie. Le rapport étrille la stratégie de la ville. Selon le bilan dressé par l’équipe d’Eric Piolle, le développement économique se mesure seulement à l’organisation d’Assises de l’achat public et d’un New green deal sans consistance. Au fond, le document met en lumière l’approche économique du maire qui refuse le concept de CAGE : compétitivité, attractivité, gestion et excellence, au motif que « cela a ruiné nos vies ». Si les auteurs reconnaissent que « nombre de politiques ultralibérales ont fait peu de cas des droits fondamentaux et des aspirations des peuples », ils s’inquiètent du refus de l’attractivité à Grenoble. « Comment mettre en avant la science et ses développements si l’on n’est pas soi-même convaincu comme responsable politique de l’importance de l’excellence scientifique ? », s’interrogent-ils.

Bref, à en croire la fondation Jean-Jaurès, la méthode Piolle est loin d’être concluante. On comprendra à travers ce rapport que les socialistes ne désespèrent pas de reconquérir la ville.

*Michelle Daran, sociologue, présidente de l’Institut régional du travail social, Alain Faure, politiste, directeur de recherche CNRS, Patrick Levy, professeur des universités, praticien hospitalier, ancien président de l’Université Grenoble-Alpes, Olivier Noblecourt, conseiller municipal de Grenoble, Martin Vanier, géographe, professeur à l’école d’urbanisme de Paris

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