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L’agriculture urbaine, au-delà de l’anecdotique ?

par Sébastien Fournier
Temps de lecture : 3 minutes

Qu’elle soit sous forme de jardins partagés au pied des immeubles ou sur les toits des nouveaux programmes immobiliers, l’agriculture urbaine semble être devenue la solution pour bâtir une ville durable. La rédaction s’est penchée d’un peu plus près sur cette agriculture émergente, encore en quête d’un modèle économique.

Par Yoanna Sallese

Dans l’imaginaire collectif, l’agriculture urbaine est un passe-temps de bobos qui se délectent de voir pousser leurs plantes aromatiques et autres tomates cerises sur un coin de roof-top. Mais il serait injuste de résumer « ce loisir » à cela. Depuis les années 2000, l’agriculture urbaine s’invite dans les débats, les grands projets et autres stratégies des sociétés et des collectivités. Ainsi, entreprises, politiques et associations voient en ce secteur de multiples ressources pour asseoir le concept de « ville durable ». L’implantation de jardin en toiture ne cesse de fleurir dans de nombreux appels à projets urbains, à l’instar de Réinventer Paris, Dessine-moi Toulouse ou encore Imagine Angers. L’agriculture urbaine devient alors une alternative durable indispensable pour les métropoles : la végétalisation des espaces publics permet de réduire la température des villes, de réduire la pollution aérienne et des sols, mais aussi de limiter les risques d’inondation et de valoriser les déchets organiques. À ceci s’ajoute le développement d’activités sociales et la création de mixité dans certains quartiers. Face aux méfiances alimentaires, notamment liées à l’usage des pesticides, l’installation de ces îlots verts permet également de produire durablement des fruits et des légumes en circuit court. Pour autant, ce secteur ne semble pas avoir encore trouvé son modèle économique. Ainsi, certains estiment que ce segment de la profession agricole mériterait d’être mieux encadré pour qu’il ne soit pas réduit à une agriculture « gadget ».

Des jardins pour créer du lien

Jardins partagés, familiaux, communautaires… L’agriculture urbaine est également appréhendée comme un vecteur social, une solution inclusive auprès de certains publics. Dans le Grand Paris, la ville de Stains accueille l’association La Ferme des Possibles qui emploie à l’année six travailleurs en situation de handicap et produit du mesclun en circuit court pour les restaurateurs aux alentours. Outre les jardins participatifs et intergénérationnels, plusieurs collectivités instaurent des parcelles maraîchères au sein de leurs parcs sociaux. C’est le cas des métropoles de Lille et de Nancy. À Grigny, dans l’Essonne, la start-up Merci Raymond a installé en 2017, dans le quartier politique de la ville de la Grande Borne, plusieurs jardins partagés à la demande de la mairie, qui souhaitait faire revivre ce quartier. « Cette activité est surtout un atelier pédagogique pour les habitants qui viennent apprendre le jardinage et les plantes. L’aspect ludique est très important, c’est aussi cela qui crée un lieu de vie et de rencontres », indique-t-on chez Merci Raymond. Ce type d’initiatives menées sur des petites surfaces ne peut en effet avoir de fonctions nourricières propres. En revanche, menées à de plus larges échelles, les politiques peuvent se montrer plus ambitieuses et s’emparer de la question de leur foncier agricole.

Au-delà du roof-top

Plusieurs territoires se mobilisent au travers de leur Schéma de Cohérence Territoriale (SCoT) et de leur Plan Local d’Urbanisme (PLU) pour conserver et revaloriser leur foncier agricole, notamment sur les hectares présents en périphérie des villes. Des métropoles comme celles de Nantes, Montpellier, Aix-Marseille-Provence et Dijon ont revu leur modèle et tendent à limiter l’artificialisation des sols tout en pérennisant les productions alimentaires. La métropole dijonnaise, par exemple, a récemment adopté son PLU et souhaite limiter ainsi à 20 hectares l’étalement urbain sur les terres agricoles pendant les dix années à venir. Cette mesure fait écho à la volonté du Grand Dijon d’atteindre l’auto-suffisance alimentaire, dans le cadre du projet « Dijon, territoire modèle du système alimentaire durable 2030 ». L’objectif est ambitieux et peu de métropoles y aspirent mais c’est une opportunité nouvelle de nouer des liens, de signer des contrats de réciprocité ou des accords de coopération. L’approvisionnement des villes est un sujet de dialogue entre urbains et ruraux qui permet de construire des stratégies à de larges échelles autour du bien-manger. Le concept de transition alimentaire est remis régulièrement sur la table, faisant écho à celui de la transition écologique. Car non, les trois fraisiers plantés sur le roof-top par des trentenaires bobos ne vont pas, à proprement parler, révolutionner le monde. Mais fort est de constater, qu’à plus large échelle, l’agriculture urbaine pourrait répondre à certains enjeux des villes de demain…

Lire la suite dans le numéro de juillet d’Objectif Métropoles de France

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