Depuis 2013, l’association Amorce et l’Ademe distinguent les réseaux de chaleur avec le label EcoRéseau. Objectif : favoriser leur développement tout en veillant à ce que les tarifs restent maîtrisés. Reportage dans les métropoles de Grenoble et Saint-Etienne qui ont été labellisées plusieurs fois.
Par Yoanna Sallese
« Il y a une dizaine d’années, nous comptions 24 061 équivalents logements raccordés à des réseaux de chaleur. Aujourd’hui, ils sont près de 41 000 », se réjouit Laurène Dagallier, chargée de mission au au sein d’Amorce, association qui accompagne les collectivités dans la transition énergétique. L’association n’y est pas pour rien. Elle a créé avec l’Ademe (Agence de la transition écologique), en 2013, le label « Réseau de chaleur », baptisé EcoRéseau. Son but : récompenser les réseaux exemplaires alimentés en énergies renouvelables. « L’écolabel s’inscrit dans les objectifs nationaux de la loi sur la transition énergétique, ajoute Laurène Dagallier. Entre 2012 et 2030, il faut multiplier par cinq la quantité produite de chaleur renouvelable et de récupération. » La première promotion avait décerné 23 labels EcoRéseau ; en 2020, l’association récompensait 53 collectivités, dont Grenoble et Saint-Étienne. Pour obtenir la distinction, plusieurs critères doivent être respectés, au premier rang desquels une exigence environnementale, avec plus de 50 % d’énergies renouvelables et/ou de récupération pour alimenter le réseau.
80 % d’énergie renouvelable dans le réseau de Grenoble
La capitale des Alpes, qui possède l’un des plus grands réseaux de chaleur de France (175 kilomètres de long), est depuis 8 ans récompensée chaque année par l’écolabel. « Nous voulons montrer à nos administrés que la métropole est active sur le plan de la transition énergétique et de l’écologie », affirme Pierre Verri, vice-président de la métropole, chargé de l’air, de l’énergie et du climat.Dans son nouveau Plan Climat 2020-2030, Grenoble Alpes Métropole entend diminuer de 50 % ses émissions de gaz à effet de serre et de 40 % sa consommation d’énergie. Un projet ambitieux permis par un réseau de chaleur très performant. Il a ainsi atteint quasiment 80 % d’énergie renouvelable et de récupération en 2019 et 2020 grâce à l’utilisation du bois énergie, de la combustion d’ordures ménagères et de chaleur fatale* récupérée auprès des industries. Au total, ce sont plus de 100 000 équivalents logements qui sont chauffés. En 2021, Grenoble souhaite aller plus loin grâce à la mise en service de sa nouvelle chaufferie, la Biomax (voir encadré). Elle permettra notamment de générer de l’électricité avec le surplus de chaleur produite. « On devrait atteindre 92 % d’énergies renouvelables sur le réseau, se félicite Pierre Verri. Je peux déjà vous annoncer un nouvel écolabel pour 2021 ! »
À Saint-Étienne, 19 000 tonnes de CO2 économisées par an
Saint-Étienne a aussi été récompensée plusieurs fois. « Nous sommes très investis dans la transition écologique », affirme Sylvie Fayolle, vice-présidente de la métropole en charge du développement durable et de la transition écologique. « Pour nos réseaux de chaleur, être labellisés était indispensable. » Ces installations soutiennent l’ambition du Plan Climat Air Énergie local, qui vise à diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050 et par deux les consommations énergétiques. La métropole stéphanoise compte neuf réseaux de chaleur (répartis sur huit communes), dont cinq sont labellisés. « Nous les avons perfectionnés, souligne l’élue. Candidater pour l’écolabel était donc très important car nous voulions être récompensés de nos efforts et inciter les administrés à se raccorder à ces réseaux. » Et cela paie car, depuis sa première candidature en 2018, la métropole de Saint-Étienne est labellisée chaque année. « Nous fonctionnons avec un mix énergétique qui est constitué à 70 % d’énergies renouvelables, ce qui permet d’éviter la production de 19 000 tonnes de CO2 par an », poursuit Sylvie Fayolle. En 2019, la métropole comptait 300 bâtiments raccordés aux réseaux de chaleur. Au total, ce sont plus 13 500 équivalents logements qui en bénéficient. Par ailleurs, cette année, trois nouvelles collectivités de la métropole devraient se raccorder.
Permettre à tous de se chauffer
L’écolabel se base également sur le critère de la tarification. « Le prix de l’énergie est fixé par les collectivités dans leur délégation de service public, explique Laurène Dagallier. Si elles veulent remporter l’écolabel, ces tarifs doivent être compétitifs. » À Saint-Étienne et Grenoble, les réseaux de chaleur sont respectivement facturés à 78 et 79 euros HT le mégawatt-heure, contre 140 euros pour l’électricité. « Si nous arrivons à maintenir un prix bas, c’est parce que nos chaufferies sont approvisionnées avec du bois implanté à 100 kilomètres maxi- mum autour de la métropole », précise Pierre Verri. Cet approvisionnement local permet non seulement d’encadrer les prix mais aussi de les stabiliser dans le temps.
La tarification est aussi un argument pour s’adresser en particulier aux bailleurs sociaux. « Nous mettons en place ces réseaux pour que les personnes qui vivent en logement HLM, ou qui ont de faibles ressources, puissent se chauffer correctement et à moindre coût », indique Sylvie Fayolle. Reste que le raccordement coûte cher. Même son de cloche à Grenoble : quand un bailleur social souhaite se raccorder au réseau de chaleur, la métropole finance l’opération à hauteur de 100 000 euros. « C’est intéressant pour nous car nous développons notre réseau et l’usager bénéficie d’un tarif garanti par la collectivité », insiste Pierre Verri. Un atout non négligeable pour réduire la facture énergétique. Surtout en cette période.
*La chaleur fatale est la chaleur résiduelle non utilisée, issue d’une activité ou d’un processus.
Grenoble se dote d’une super centrale, la « Biomax »La métropole de Grenoble a inauguré, en février 2020, sa nouvelle chaufferie, baptisée Biomax. Il s’agit d’une centrale de cogénération 100 % bois, qui produit de la chaleur mais aussi de l’électricité, grâce à un générateur de vapeur de 40 mégawatts-heures. À terme, la chaufferie Biomax devrait permettre d’alimenter de 15 000 à 20 000 logements en chauffage urbain et 10 000 logements en électricité. Grâce à cette nouvelle centrale, Grenoble Alpes Métropole devrait économiser environ 12 000 tonnes de CO2 chaque année. |
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