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Nouvelles façons d’habiter, quand l’expérimental se normalise…

par Yoanna Sallese
Temps de lecture : 3 minutes
Logements rares et chers dans les zones tendues, modèle d’une famille à géométrie variable, monoparentale et recomposée, précarité des emplois et mobilité professionnelle… La société évolue et les façons d’habiter avec elle. À l’heure où l’on partage son vélo, sa voiture et même son logement pendant les vacances sur les plateformes de type Airbnb, la fabrique de la ville se met à niveau. Les usages redessinent les frontières et les murs des immeubles. Architecture modulable pour faire évoluer les logements, habitat intergénérationnel, participatif, coliving se font une place dans les projets immobiliers. Tendance du moment ou véritable changement de paradigme ?

Par Cécile Perrin

Il est encore question d’expérimentations mais les projets infusent et se multiplient. Toujours avant-gardistes, les immeubles évolutifs sont la marque de ce changement vers une adaptation de l’habitat à l’habitant. Si un jeune couple apprécie son salon, il sera heureux de le transformer en chambre à l’arrivée d’un bébé… Inversement, lorsque les enfants quittent le domicile familial, les parents apprécient de retrouver une grande pièce à vivre. La loi Elan* vise à favoriser cette évolutivité en permettant la construction de gros œuvre doté de cloisons escamotables ou l’adaptation au passage d’un fauteuil roulant… Si cette architecture modulable peut se faire à l’échelle d’un logement, elle est aussi possible entre logements d’un même immeuble. Ce concept est au cœur du projet de Star Stratégies + Architecture à Ivry-sur-Seine. L’idée est d’envisager dès la construction une évolution, par exemple un T5 avec deux chambres entièrement séparables et accessibles par le palier. Ainsi, une famille pourra acheter l’appartement et revendre un T1 ou T2 lorsque les enfants auront grandi. Lancé par la SADEV94, le projet de 330 logements est aujourd’hui porté par Sogeprom Habitat dans le futur quartier Ivry Confluences. Cette architecture évolutive est également adaptée pour des logements en corésidence, sortes d’habitats partagés autour d’espaces communs, conçus dès l’origine pour être séparés en plusieurs appartements si le besoin se présente.

Résidences seniors et intergénérationnelles

D’autres formes d’habitat connaissent un nouvel essor, comme les résidences seniors inclusives, intermédiaires entre le maintien à domicile et la maison de retraite. Les projets de « Papy loft », malgré leur appellation un peu fruste, correspondent à un besoin : les per- sonnes âgées relevant du logement social recherchent un habitat adapté, comportant des parties privatives mais proposant des espaces de convivialité. Le tout à proximité des commerces et des services. Les résidences intergénérationnelles ont, elles aussi, la cote. Des projets urbains, initiés par les pouvoirs publics, intègrent des logements adaptés aux plus âgés à des ensembles immobiliers mixtes.

C’est, par exemple, le cas de Lumi’Air d’Eiffage Immobilier avec 244 logements, dont une résidence étudiants de 170 logements et 15 conçus pour des seniors dans le quartier du Centre Hospitalier Régional Universitaire de Lille. Des projets plus cosy sortent de terre grâce à l’habitat participatif. Porté par des habitants – seniors – eux- mêmes, le projet La Chamarel à Vaulx- en-Velin dans la métropole lyonnaise accueille 16 logements et des espaces communs, une salle, un atelier de bricolage, deux chambres d’amis et un bureau. Ce type d’opérations, comme celle des Babayagas à Montreuil, en région parisienne, offre une autre façon de vivre sa retraite…

Imaginer son chez soi

L’habitat participatif qui consiste à co- construire un logement avec ses futurs habitants existe depuis longtemps, un peu partout en France. La preuve, on en recense plus de 500. Mais il devrait se développer avec la mise en œuvre de la loi Alur de 2014 et la sécurisation des montages juridiques et financiers. De plus en plus souvent, l’habitat participatif se fait outil de mixité sociale, en associant les projets d’auto-promotion, portés par les futurs propriétaires, et un acteur du logement social. Il est aussi soutenu par des collectivités qui y voient un vecteur de lien social

favorisant de nouvelles formes de solidarité et d’innovation. Ce mode de faire « démontre qu’un projet de logement doit dépasser les dimensions spéculatives pour devenir un véritable levier de fabrication d’une ville plus durable, qui répond à la fois aux défis climatique, énergétique et écologique et ne peut donc se construire qu’avec ses habitants », selon Alain Jund, adjoint au maire de Strasbourg qui présidait le Réseau national des collectivités pour l’habitat participatif jusqu’au mois de janvier dernier (voir encadré). Bien que l’habitat participatif mutualise le plus souvent des espaces, comme une buanderie ou un jardin extérieur, il ne s’agit pas d’habitat partagé ou de corésidence. Chacun dispose d’un loge- ment tout en appartenant à une communauté formée au fil du temps. Ces opérations contribuent à produire de l’habitat diversifié, de quoi répondre au plus grand nombre.

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