A Bordeaux, le lancement de la 5G se fait dans la douleur. La municipalité PS-EELV s’est efforcée de retarder l’arrivée des opérateurs, mais sans grand succès. Aujourd’hui, Bouygues Telecom et SFR ouvrent leurs réseaux et la ville fait triste mine.
Des opérateurs mobiles satisfaits mais une municipalité « désolée ». Voilà comment résumer le lancement de la 5G à Bordeaux. Depuis lundi dernier, Bouygues Telecom et SFR ont ouvert leurs nouveaux réseaux dans la ville tenue par une majorité PS-EELV, réticente au déploiement de cette technologie. « C’est un aveu d’échec » a aussitôt déclaré Delphine Jamet, l’adjointe au maire EELV Pierre Hurmic. Une situation ubuesque.
Comme d’autres municipalités de gauche, si Bordeaux est hostile au déploiement, en l’état, de la 5G, c’est parce qu’il n’y a pas encore eu de mesures d’impact. « Nous ne sommes pas contre le progrès, mais nous avons besoin de données fiables pour prendre des décisions », explique Delphine Jamet. « Quels effets sur la santé ou sur le plan écologique ? », s’interroge-t-elle en citant les accords de Paris. Avant son élection, Pierre Hurmic s’était engagé à obtenir un moratoire. Force est de constater qu’il n’y est pas parvenu. Aujourd’hui, les élus attendent impatiemment le rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) dont les conclusions sont attendues à la fin du trimestre.
Des mesures à l’échelle de l’agglomération
Depuis les municipales de juin 2020, la nouvelle municipalité a bien tenté d’enquiquiner la vie des opérateurs. Fin novembre, alors que tout était prêt techniquement, la ville de Bordeaux a demandé à SFR de retarder son lancement. Dans le même temps, pour en avoir le cœur net, elle a demandé à l’Agence nationale des fréquences (ANFR), qui venait d’ouvrir un observatoire des ondes, d’installer à Bordeaux 3 capteurs de mesure comme ce fut le cas à Nantes et Marseille. Les résultats obtenus, disponibles en temps réel sur le site de l’ANFR, sont loin d’être alarmants. Ils varient entre 1 et 2 v/m soit 30 à 50 fois moins que le seuil d’alerte. Mais, pour les élus, cette analyse n’est pas suffisante. Ils veulent plus de données. La ville et la métropole viennent d’acheter plusieurs capteurs afin de les installer dans chaque commune de l’agglomération. Les élus attendent les résultats avant de se prononcer.
Mais alors pourquoi ont-ils autorisé le lancement par Bouygues et SFR ? En fait, la ville n’a pas donné son accord mais elle ne s’y est pas opposée selon les connaisseurs du dossier. D’abord parce que Bouygues, en 2018, avait fait de Bordeaux un site pilote 5G. Puis, en raison de la guerre impitoyable que se livrent les opérateurs entre eux, il était difficile de dire à SFR de patienter davantage. En fait, face à la puissance d’action des industriels, pressés de rentabiliser au plus vite l’acquisition fort onéreuse de leurs licences, et la célérité de l’Etat à empocher le magot, la ville peut difficilement batailler. D’autant que les opérateurs mettent en avant le travail de l’ANFR pour justifier l’ouverture aujourd’hui de la 5G.
Une affaire de communication
Dans ce contexte, il reste la communication. Les élus ne veulent pas donner l’impression de se dédire. Delphine Jamet explique que beaucoup de militants l’invectivent car la ville n’a pas su stopper les ardeurs des opérateurs. Et tant pis si la communication est confuse. Sans le dire, SFR qui souhaite, comme tous les opérateurs, conserver de bonnes relations avec la ville, ne comprend pas la sortie de Delphine Jamet. L’intéressée reconnaît que les mots sont forts. « J’aurais dû parler d’impuissance plutôt que d’échec ». Mais très vite, elle repart au combat. « On nous a quand même traité d’Amish (…) on prend les citoyens pour des imbéciles », s’agace-t-elle.
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